Il y a des noms qui évoquent des eaux turquoises, des cocotiers, des couchers de soleil. C’est le cas de San Blas, ou plutôt Guna Yala, son véritable nom.
Situé au large de la côte caraïbe du Panama, à la frontière avec la Colombie, cet archipel mythique compte plus de 365 îles et îlots, une pour chaque jour de l’année, dit-on. Un véritable bijou naturel où la mer semble se confondre avec le ciel.
Guna Yala, la Terre des Gunas
San Blas est un nom hérité de la colonisation espagnole. Mais ici, les habitants préfèrent dire Guna Yala, “la terre des Gunas”.
Les Gunas sont l’un des 7 peuples autochtones du Panama. Indépendants et profondément attachés à leurs traditions, ils ont su préserver leur langue, leur culture et leur autonomie.
Leur territoire est reconnu comme une région autonome depuis 1953, qu’ils administrent selon leurs propres règles. Cette autonomie, les Gunas l’ont conquise de haute lutte.
Au début du XXᵉ siècle, les Gunas vivaient sous la pression du gouvernement panaméen, qui tentait d’imposer ses lois, son éducation et ses coutumes sur leurs terres. En 1925, face à ces atteintes à leur identité, ils se sont soulevés lors de la “Révolution de Tule”, une rébellion qui marqua profondément le pays.
Cette révolution aboutit à un accord historique : le Panama reconnaît aux Gunas le droit de gérer leur territoire selon leurs propres règles et traditions. C’est ainsi que fut créée la Comarca Guna Yala, une région autonome dotée de son propre gouvernement coutumier.
Aujourd’hui, chaque île ou communauté est dirigée par un cacique, chef traditionnel et porte-parole de son peuple. Les décisions importantes sont prises lors de congrès communautaires, selon un système de gouvernance fondé sur le dialogue et le consensus.
Les lois panaméennes s’appliquent, mais les Gunas conservent une large liberté en matière de gestion des terres, de culture, d’éducation et d’organisation sociale.
Cette indépendance a permis au peuple Guna de préserver son mode de vie face à la modernisation rapide du reste du pays.
Visiter Guna Yala, c’est donc entrer sur une terre à part, à la fois fière, paisible et profondément enracinée dans ses valeurs.
Visiter Guna Yala : L’aventure commence dès la route
Depuis Panama City, il faut compter environ 2h30 à 3h de route pour rejoindre la côte caraïbe. La route serpente à travers la jungle, entre montées et descentes, avant d’arriver à un poste de contrôle Guna. La route est en très bon état mais il s’agit d’une route vallonnée avec beaucoup de courbes.
On y paie un droit d’entrée, on montre son passeport… et soudain, on comprend qu’on pénètre dans un autre monde.
Pour éviter toute complication, il est conseillé de passer par une agence locale.
Terra Panama travaille main dans la main avec des familles Guna de confiance pour organiser des séjours authentiques et respectueux. Les départs pour le territoire se font depuis la capitale.
Venir avec son propre véhicule n’est pas recommandé, car l’accès peut être refusé sans autorisation préalable.
Après cette frontière, la route continue jusqu’au port. Encore un petit trajet en bateau à moteur… et déjà, les premières îles apparaissent à l’horizon.
Deux manières de visiter et vivre Guna Yala
En immersion traditionnelle
La manière la plus authentique de découvrir Guna Yala est de loger dans une cabane traditionnelle, les pieds dans le sable. Et oui, ici il n’y a pas de complexes hôteliers. Les séjours se font en totale immersion. Le confort est sommaire : Pas d’eau courante, pas de climatisation, parfois même pas d’électricité toute la journée… mais la mer à deux pas, une eau cristalline et un ciel étoilé d’une pureté inoubliable.
Le confort est simple, mais l’expérience est unique. Ici, on se déconnecte pour de vrai.
Les séjours se font en pension complète (petit-déjeuner, déjeuner, dîner). Nous recommandons d’y passer 1 à 2 nuits maximum, voire plus pour ceux qui souhaitent prolonger la parenthèse.
En catamaran
L’autre option, plus confortable, est de voguer en catamaran.
C’est la combinaison parfaite entre aventure, confort et détente : chambres privées, repas préparé par un chef, balades en kayak et snorkeling dans des eaux pleines de vie.
Chaque lever de soleil se vit depuis une nouvelle île, chaque journée est une carte postale. Pour la durée, vous choisissez !
Il est également possible de visiter Guna Yala en excursion d’une journée, pour les plus pressés. Mais attention : la route est longue (environ 3h aller et 3h retour), avec un départ très tôt vers 5h du matin et un retour autour de 20h.
Un peuple discret et fier
Les Gunas vivent principalement de la pêche, du tourisme et de la vente de leur artisanat, surtout des molas, ces tissus colorés brodés à la main qui racontent leur histoire et leur vision du monde. Un musée sur les molas existe dans le Casco Viejo, très intéressant et gratuit !
Ce peuple se distingue par une discrétion remarquable. On sent qu’ils tiennent à préserver leur monde, leur culture, leur rythme de par leur histoire et c’est sans doute ce qui rend Guna Yala si vrai.
Passer quelques jours dans l’archipel, c’est accepter de ralentir. Oublier le réseau, le confort, les horaires. C’est se lever avec le soleil, se baigner dans une mer tiède, goûter au poisson grillé sur la plage et s’endormir sous les étoiles.
Guna Yala, c’est une leçon de simplicité.
Dans un monde qui va toujours plus vite, elle nous rappelle qu’on peut encore vivre autrement.
Parler Guna :
La langue Guna (Dulegaya) ne compte que 15 lettres :
a, b, d, e, g, i, l, m, n, o, r, s, u, w, y
Voici quelques mots pour faire le plus bel effet sur le territoire :
Bonjour : Anna (à prononcer naa)
Merci : Dot Nued
Oui : Eye
Non : Na
île : Dub
Soleil : Igwa
Santé : Iddo malando
Eau : dii
Un peu de culture : les drapeaux de Guna Yala
Guna Yala possède deux drapeaux, chacun chargé d’histoire et de symboles.
Le drapeau officiel de la nation Guna
Composé de trois bandes horizontales : rouge, jaune et verte, il flotte aux côtés du drapeau panaméen dans toutes les écoles, institutions et villages.
- Le rouge évoque le sang versé par le peuple Guna.
- Le jaune symbolise la richesse spirituelle et culturelle.
- Le vert représente la forêt vierge, la Terre Mère.
Au centre, deux bras levés :
- L’un brandit un arc et une flèche, symbole de Simral Colman, héros et défenseur du peuple.
- L’autre incarne son successeur, garant de la continuité du destin Guna.
Autour, huit étoiles représentent les huit frères guerriers d’Ibeler, figures mythiques et protectrices.
Le drapeau de la Révolution de 1925
Souvent aperçu dans les villages, sur les bijoux ou peint sur les bateaux, ce drapeau fut adopté après la Révolution de Tule.
Son fond rouge symbolise le sang versé lors du combat pour l’autonomie, tandis que le jaune incarne le soleil, unique témoin de leur histoire.
Au centre, une swastika noire, loin du symbole européen auquel on pourrait penser : ici, elle représente une plante médicinale sacrée dont les branches s’étendent vers les quatre points cardinaux, symbole d’unité et de vie.
Guna Yala n’est pas qu’un archipel paradisiaque : c’est une terre d’histoire, de résistance et de fierté.
Un lieu où le bleu de la mer rencontre l’âme d’un peuple libre, et où chaque île semble murmurer : “Bienvenue en terre Guna.”







